UE 1.1.S2 – Psychologie, sociologie, anthropologie
Université Paris Descartes (75)
Juin 2017

Sujet

S. Fainzang, 2006 : La relation médecin- malade : information et mensonges, Paris, Presses Universitaires de France, p. 126

 

Extrait :

 

« (…) Un oncologue confronte les résultats de la prise de sang qu’a subi une patiente, atteinte d’un cancer de l’appareil digestif, avec ses examens précédents :
Le médecin : « C’est remonté, mais il y a rien qui a bougé. »
La patiente : « ? »

(La patiente me confirmera plus tard qu’elle n’a pas compris ce qu’il voulait dire, mais qu’elle a supposé qu’il y avait tout lieu de s’inquiéter.)

Le médecin : « Y a quelque chose qui se passe mais vaudrait mieux reprendre la chimio. »
La patiente : « Pfff ! »

Le médecin : « Les images n’ont pas bougé, mais il faut jouer la carte de la prudence. »

La patiente, résignée : «Ben, s’il faut ! »
Le médecin : «Ce n’est pas obligatoire, on peut attendre septembre, mais pour nous (sous- entendu : l’équipe médicale), il vaudrait mieux. N’Y a pas d’urgence ! La logique voudrait qu’on le fasse ; ça veut dire que la maladie bouge ; il faudrait reprendre. »

 

(La patiente est perplexe. Devant les précautions prises par le médecin pour ne pas l’alarmer, qui lui laisse entendre, à cette fin, que ce traitement n’est pas obligatoire, elle ne sait pas ce qu’elle doit décider et comment elle doit interpréter les paroles du médecin.)

 

La patiente : « Ah bon. Moi, j’croyais que c’était fini, mais si ça revient ! » (Dit- elle pour signifier qu’elle est prête à s’y soumettre s’il le faut).
Le médecin : « Non, non, ça revient pas. Pourquoi, ça vous embête ? Vous n’aviez pas pensé la reprendre, la chimio ? »

La patiente : « Ça pourrait reprendre dans le sang ? »

Le médecin : « La cinétique, on ne sait pas trop. »
La fille de la patiente intervient : « Est-ce qu’il se pourrait pas que ça soit caché et que vous ne le voyiez pas ? Vous voyez tout là-dessus ? » (Le ce ou le ça exprime l’indicible.)
Le médecin : « Le bilan de votre foie, il est bon. »
La patiente : « J’en avais un tout petit au lobe du poumon droit. Est-ce qu’il est parti ? » (On remarque l’usage du « en » qui fait référence à quelque chose qui n’est jamais nommé, à aucun moment de la consultation).
Le médecin : « Là, on voit plus rien. »
La patiente : « Oui, mais y en avait un tout petit qui y était pas au début ! »
Le médecin : « L’évolution est favorable ; le petit nodule, on le voit plus. On peut tempérer et refaire un scanner dans un mois, si vous voulez. »

 

(Le médecin veut limiter l’inquiétude du patient et lui montrer que la situation n’a pas un caractère de gravité, plongeant dans le trouble la patiente qui est pourtant disposée à reprendre la chimio thérapie- même si ce n’est pas de gaieté de cœur – si le besoin s’en fait sentir.)

 

La patiente : «Mais ça risque pas de se déclencher en vitesse ? C’est ça qui me fait peur ! Si vous croyez qu’avec une chimio ça serait mieux …. »

 

(La patiente essaie d’amener le médecin à lui dire avec conviction qu’il faudrait reprendre une chimio thérapie car elle craint de ne pas faire le traitement nécessaire, tandis que le médecin essaie de retarder sa décision, pensant que la patiente redoute la thérapie et la signification qu’aurait pour elle sa reprise.)

Le médecin : « C’est plus prudent ; moi, c’est le conseil que je vous donnerais. »
La patiente hoche la tête.
Le médecin : « Si vous voulez, on attend fin juillet pour couper la poire en deux. »
La fille de la patiente : « Il vaudrait mieux que tu en refasses ; ça serait dommage que ça reparte !»

Le médecin : « Vous n’inquiétez pas ; un mois de délai, ce n’est pas … Le scanner, il ne bougera pas en un mois. On va juste faire une prise de sang pour voir les marqueurs. Si ça monte, on verra. »

 

Le médecin la salue et sort du cabinet de consultation. Il dicte le compte rendu de consultation :
« Cancer du côlon avec métastases hépatiques et pulmonaires. Dans ces conditions, je propose à la patiente de reprendre une chimio, mais la patiente préfère surseoir. » (…) »

 

 

1e partie (11 pts)

Question 1 (4 pts) – Le texte de S. Faizang renvoie au concept de « maladie».

a) Proposez une définition de ce concept, selon vos propres termes, qui soit pertinente en anthropologie et/ou en sociologie et illustrez-le à partir des éléments du texte (2 pts)

b) Choisissez un concept parmi les suivant : « normes sociales », « déviance », « soin », « représentations sociales », statut social ». Définissez-le et illustrez-le à partir des éléments du texte (2 pts)

 

Question 2 (4 pts)

a) Définissez le concept de « rôle social » (1pt)

b) Expliquez en quoi la situation de la patiente renvoie aux dimensions du rôle social et justifiez en utilisant des citations du texte (3 pts)

 

Question 3 (3 pts) – En vous référant au concept d’ « individu » étudié en cours, expliquez comment, dans ce texte, la patiente devient progressivement « sujet du roi ».

 

2e partie (8 pts)

Question 4 (8 pts)

a) Décrivez une situation d’incompréhension entre soignants et soignés, que vous avez connue et à laquelle ce texte vous fait penser.

b) Proposez au moins une explication à l’attitude du patient avec mobilisation des concepts de l’UE 1.1 S2 et explicitez les conséquences sur la relation soignant-soigné.


Source: Université Paris Descartes