Atteintes cutanées par brûlures
DÉFINITION
Atteinte de l’intégrité de la peau, des muqueuses et/ou des tissus sous jacents par des agents thermiques, chimiques, électriques ou des radiations
Traumatisme local peut devenir général
EPIDÉMIOLOGIE
500 000 brûlures par an
6 500 hospitalisations par an
70% accidents domestiques
20% accidents travail
8% tentative autolyse
3% AVP
45% enfants
LA PEAU: ÉPIDERME + DERME + HYPODERME
Epiderme
- rôle: protection mécanique, régulation thermique, protection infectieuse, sensibilité, esthétique
- 90% kératinocytes
- mélanocytes
- cellules de Langerhans
- renouvellement spontané en 7-10 jours
Derme
- fibreux
- tissu conjonctif
- fibroblastes
- matrice extra-cellulaire
- collagène et élastine
- jonction derme/épiderme en papilles
CAUSES
Brûlures thermiques = 90%
- Contact: liquide (étendu mais souvent moins profond) et solide (la gravité dépend du temps de contact)
- Flamme: hydrocarbures, explosion, incendie, fumées toxiques
- Rayonnement: UV le plus souvent (étendu mais peu grave), rayons X, nucléaire
Brûlures chimiques
- acides
- bases
- souvent limité sauf jet volontaire
- évolution des lésions avec approfondissement secondaire
Souvent très profondes
Inadéquation point d’entrée / importance des lésions
Surveillance cardiaque
Risque de thrombose vasculaire
FACTEURS AGGRAVANTS
Ages extrêmes de la vie
Pathologie chronique préexistante (diabète, insuffisance cardiaque, pathologie pulmonaire)
Déficit immunitaire
Traumatisme grave associé
Ils peuvent modifier le pronostic évolutif local et général
PHYSIOPATHOLOGIE
Brûlure = pathologie inflammatoire aiguë
Oedème local
Fuite plasmatique (électrolytes et protéines)
Baisse de la pression oncotique sanguine: l’oedème se généralise (pulmonaire)
Dépression myocardique
Anémie inflammatoire
Possible choc hypovolémique
PHASE SECONDAIRE
Hypercatabolisme
- hypothermie
- lutte contre infection et la douleur
- dénutrition, immunodépression, fonte musculaire
Déséquilibre endocrinien
- insuffisance surrénale
- diabète de stress
Troubles digestifs
- translocation bactérienne
- ulcère de stress
Absence de protection contre les bactéries exogènes et translocations bactériennes endogènes + déséquilibre immunitaire avec immunodépression = risque septicémique et vital
RETENTISSEMENT GÉNÉRAL: LOCALISATION
Face
- oedème
- lésions associées voies respiratoires
- lésions associées ophtalmologiques
Zones fonctionnelles = mains, pieds, cou, régions articulaires
- attention aux brûlures circulaires
- séquelles souvent importantes
- raideur, limitation des amplitudes articulaires
- trouble de la croissance
Périnée
- risque infectieux
RETENTISSEMENT LOCAL: PROFONDEUR
Brûlure superficielle: la cicatrisation est obtenue à partir des cellules épithéliales résiduelles
Brûlure profonde: cellules épithéliales détruites donc la cicatrisation ne peut être obtenue = greffe de peau
3 degrés
- 1er degré
- 2e degré superficiel
- 2e degré profond
- 3e degré
1er degré
- atteinte couche cornée, respect membrane basale
- érythème douloureux
- cicatrisation spontanée
- pas de séquelles
2e degré superficiel
- atteinte de l’épiderme, atteinte partielle de la membrane basale
- phlyctènes
- douleurs
- coloration rose homogène
- cicatrisation spontanée
- cicatrices possibles: dyschromie
2e degré profond
- atteinte de tout l’épiderme + atteinte partielle du derme
- phlyctènes possibles
- douleur
- coloration rouge + zones blanchâtres
- cicatrisation spontanée longue et risque hypertrophie
3e degré
- atteinte épiderme + derme + hypoderme
- aspect “cuir”, froid
- beige à noir
- pas de douleur
- vitropression négative
- pas de cicatrisation spontanée
EXAMEN CLINIQUE DU BRÛLÉ
Interrogatoire
- âge du patient
- circonstances, témoins
- heure de survenue
- agent brûlant
- premiers soins réalisés
- antécédents
- traitement en cours
Examen physique
- surface brûlée
- profondeur: souvent difficile à estimer précocement
- localisations particulières
- lésions associées
- recherche de signes de lésions des voies aéro-digestives supérieures: dysphonie, polypnée, tirage, saturation < 95% => transfert en réanimation rapide
SPÉCIFICITÉS PRISE EN CHARGE PÉDIATRIQUE
Pas de brûlure bénigne même si majorité < 10% surface corporelle
Evaluation surface brûlée ≠ adulte
Pas de geste chirurgical trop précoce car potentiel de cicatrisation spontanée important
Prise en charge psycho sociale familiale
Dépistage maltraitance / négligence (5-10% cas)
MALTRAITANCE DE L’ENFANT
Savoir l’envisager quand:
- histoire de la maladie non cohérente avec lésions
- lésions inexpliquées
- attitude de l’enfant inhabituelle, inadaptée
Le plus souvent négligence
Milieu défavorisé
Signalement et enquête sociale
CRITÈRES DE GRAVITÉ
Inhalation de fumées
Surface étendue
Age < 1 an
Localisations: face, mains, périné
Brûlure circulaire
Brûlure électrique
Brûlure chimique
Suspicion négligence / maltraitance
Brûlures bénignes
- brûlures < 5%
- pas de facteur de gravité
- 1er et 2e degré superficiel
- contexte social favorable
- traitées en ambulatoire par des pansements
Brûlures de gravité intermédiaire
- brûlure entre 5 et 10%
- localisations particulières
- contexte social défavorable, négligence, suspicion de maltraitance
- hospitalisation en structure adaptée
Brûlures graves
- brûlures 15 à 50% de la surface corporelle
- et/ou lésions pulmonaires par inhalation de fumées
- et/ou origine de la brûlure (brûlures électriques ou chimiques)
- hospitalisation en centre de brûlés +/- réanimation brûlés
Brûlures très graves
- brûlures dont la surface dépasse 50% de la surface corporelle
- hospitalisation en réanimation spécialisée brûlés
PHASE INITIALE DES SOINS
En urgence
- Stopper l’exposition à l’agent brûlant
- Enlever les vêtements
- Refroidir la brûlure mais pas le brûlé : 5 à 10’ sous eau à 20°
- Effondrer les éventuelles phlyctènes
- Brûlure circulaire des membres : retirer les bijoux éventuels et surélever le membre
- Sécher la peau non brûlée
- Recouvrir de pansements propres provisoires
- Envelopper le patient dans une couverture isotherme
- Rechercher d’autres lésions
Objectifs des soins locaux
- lutte contre la douleur
- lutte contre l’infection
- obtention du maximum de cicatrisation spontanée
- prise en charge psychologique
Lutte contre la douleur
- douleur de fond + douleur provoquée
- utilisation d’échelles d’évaluation adaptées à l’âge
- antalgiques systématiques à intervalles fixes pour traiter la douleur de fond
- prémédications avant les soins
- antalgie pendant les soins
- utilisation d’antalgiques de palier I à III
Lutte contre l’infection
- lavage des mains
- chambres individuelles
- lieux dédiés aux soins, adaptés et nettoyés
- prélèvements bactériologiques répétés
- lavage avec savon antiseptique non alcoolique des zones brûlées
- rasage des zones pileuses brûlées ainsi que des zones pileuses adjacentes
- pas d’antibiothérapie systématique sauf signes patents d’infection
Cicatrisation – Evolution brûlure
- détersion
- bourgeonnement
- couverture
Patient suivi en externe
- pansements: interface neutre + antiseptiques renouvelés /24 à 48h
- prélèvements bactériologiques initiaux puis renouvelés en cas de suspicion d’infection
10 jours puis décision chirurgicale si zones étendues non cicatrisées
INTERVENTION CHIRURGICALE
Détersion accélérée par excision des zones nécrotiques
Obtention de tissu de bonne qualité = hémorragique
Couverture définitive si surface peu étendue ou temporaire si surface brûlée étendue
Greffe de peau mince
- prélèvement d’une couche très fine d’épiderme (2 à 4 µm)
- autogreffe: donneur = receveur, pas de réaction immunitaire
- pleine ou expansée en filet
Greffe de peau totale
- prélèvement de la totalité de l’épiderme et du derme
- utilisée pour les séquelles ou la reconstruction de la face
Allogreffes
- donneur et receveur même espèce
- donneur décédé
- conservation en banque
- rejet tardif (21 jours)
- couverture temporaire chez les grands brûlés
Xenogreffes
- donneur et receveur d’espèce différente
- porc
- utilisées comme pansement biologique
- pas d’intégration
Cultures cellulaires
- grands brûlés
- long (21 jours)
- couteux
- résultat esthétique faible
SOINS POST-OPÉRATOIRES
Objectifs
- favoriser l’intégration de la greffe
- prévenir les infections du site opératoire
- lutter contre la douleur
Favoriser l’intégration de la greffe: adhérente en quelques heures puis revascularisation les jours suivants, altérée par excision insuffisante, mobilisation intempestive ou hématome sous la greffe
- réfection du pansement /24 ou 48h
- maintien milieu humide et propre
- nettoyage et décroûtage doux sans frotter
Fixation des greffes par des fils ou des agrafes
Immobilisation des zones greffées
Jusqu’à J7: pansement humidifié avec antiseptique
Puis pansement gras + antiseptique jusqu’à cicatrisation complète
Pansement des sites donneurs avec algostéril laissé en place
SOINS DES GRANDS BRÛLÉS
Hospitalisation > 3 mois
Lutte contre la douleur, la dénutrition, l’infection
Multiples interventions
Prévention des escarres
Attention aux pansements
Prise en charge associée
- durée hospitalisation augmente avec surface brûlée
- soutien psychologique du patient et de l’entourage
- entretiens avec assistante sociale et psychologue
- rappel des règles de prévention des accidents domestiques pour éviter récidive
- kinésithérapie
- mise en place de postures
- lutte contre raideur articulaire
- lutte contre rétraction cicatricielle
Mesures associées
- éducation du patient ou des parents aux soins des cicatrices: massages, protection solaire
- prescription de soins de rééducation et de kinésithérapie
- hospitalisation en centre de rééducation si besoin
- prescription de vêtements ou masques compressifs en cas de greffe, contrôle de leur tolérance
- prescription de cures thermales si besoin
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